Ces derniers jours, nous avons pu constater une offensive médiatique de Douaisis Agglo pour justifier ses divers projets pour le territoire : le boulodrome, la patinoire, la passerelle etc…
Sur fond de lynchage des écologistes et de leurs allié·es, nous avons pu voir Christian Poiret dans une vidéo de l’Observateur du Douaisis s’enorgueillir de "planter des arbres".
Lors de la projection de "La théorie du boxeur" par le Festiplanète, nous avons aussi pu assister à un discours de promotion de la semaine de l’alimentation durable par Jean-Luc Hallé et du soutien de l’agglomération aux agriculteur·rices.
Doit-on en conclure que l’agglomération est écoresponsable ? Pas vraiment.
Stéphanie Stiernon, élue écologiste, lors d’un conseil d’agglomération avait dénoncé une politique écologique sous la forme de patchwork, qui n’avait, d’un point de vue global, pas vraiment de sens. Une politique écologique clairsemée complètement neutralisée par les autres politiques menées par l’agglomération.
Qui dit vrai ?
C’est toute la difficulté de l’écologie. En effet, il est tout à fait possible, via quelques actions symboliques, d’avoir l’air d’en faire.
C’est la faiblesse de l’écologie en tant que doctrine politique. C’est d’ailleurs pour cette raison que tous les partis, sans exception s’en réclament. Le discours dominant étant, par ailleurs, qu’un parti écologiste ne sert à rien puisque tout programme doit traiter ce sujet, au même titre que l’économie ou la défense.
Sauf que, pour que les politiques écologiques portent leurs effets, il n’est pas suffisant de fourbir quelques mesures vertes isolées. Il faut, en réalité, passer toutes les politiques publiques au crible afin d’éviter de "déshabiller Pierre pour habiller Paul".
Cette idée se résume en un concept simple : le filtre écologique. C’est ce filtre que nous portions dans le programme d’Europe-Écologie Les Verts en 2020 pour Douai et le Douaisis.
Avec 4 années de recul, la pertinence de ce filtre saute aux yeux. Que de projets mortifères auraient été évités avec ce filtre à l’esprit. Et combien auraient été bien mieux exécutés.
Sans ce filtre, on ne peut récolter les bénéfices d’une politique foncièrement écologiste. Ce n’est pas étonnant que pour certain·es, l’écologie soit vécue comme une contrainte puisqu’iels ne perçoivent pas cet horizon.
En effet, l’écologie apporte des bénéfices systémiques de part la convergence de ses effets qui démultiplie leur efficacité respective.
Un réseau de pistes cyclables peut s’articuler avec la création de haies apportant de l’ombre aux usager·es mais aussi des effets bénéfiques pour les terres agricoles et la biodiversité.
Mais ce n’est pas tout, elles améliorent la qualité de vie des habitant·es en réduisant le traffic routier, et donc les nuisances qui vont avec. Les personnes libérées des entraves (nombreuses) à la pratique du vélo sont en meilleure santé et font des économies substantielles (carburant, entretien du véhicule).
Mais ces effets ne peuvent se ressentir sans une politique de transformation massive telle que celle que les écologistes expérimentent dans les métropoles conquises (ou confirmées) en 2020 (Grenoble, Lon, Bordeaux, Strasbourg…) et surtout, sans mettre un terme à tous les projets qui vont à l’encontre de ces bénéfices (nouvelles routes, ZAC, gigantisme…).
Autre exemple, la création d’ilôts de fraîcheur urbains peut permettre de nourrir également la population avec des essences choisies pour leur production de fruits. Ils peuvent également recueillir des composteurs collectifs et accueillir de la biodiversité, compléter les trames vertes/bleues, noires d’un maillage de refuges pour les espèces communes. Et pourquoi ne pas profiter de la création d’ilots de fraicheur pour mettre en œuvre les rues aux écoles (enfin !).
Et tant que nous sommes sur les rues aux écoles, pourquoi ne pas profiter de la transformation des cours de récréations en ilots de biodiversité (concept d’écoles Oasis) pour créer une continuité écologique avec elles et le réseau cyclable qui permettrait à nos enfants d’aller à l’école en toute sécurité en vélo ?
Via ce bref aperçu, on peut mesurer les convergences possibles. Mais encore faut-il ne pas nuire à ces dernières avec des mesures contre productives.
Le filtre écologique ne permet pas à certaines mesures de passer. Dans le Douaisis, les suivantes n’auraient jamais vu le jour :
stades synthétiques (j’ai développé les raisons dans mon article sur le stade synthétique de Douai),
les projets routier (dans le Douaisis la RD500 ou l’échangeur de Lambres-lez-Douai) : il faut un moratoire sur la création de nouvelles routes de toute urgence,
les entrepôts logistiques sur des terres agricoles ou de nature (comme récemment Primelog) ou les nouvelles ZAC (le Carrefour Market de Sin-le-Noble),
les réfections de rue dégradant les conditions de circulation des cyclistes (la rue de Paris à Douai) ou ne prévoyant pas de végétation (avenue de Metz),
et enfin, les grands projets comme la fameuse patinoire ou le boulodrome du Douaisis.
Certains projet de l’agglomération ne sont pas mauvais en soi, mais mal exécutés :
la ligne B permet de développer les transports en commun, mais a rogné sur la cyclabilité plutôt que sur le stationnement,
la passerelle d’Euradouai part d’un bon sentiment, mais ne prévoit de cyclabilité et ne dessert pas les voies,
les équipements sportifs ne sont pas tabous dans une politique écologique, mais ils doivent intégrer les contraintes de la transition écologiques : infiltration, espace de nature, réduction des déplacements etc…
Les grands projets qui passent au filtre de la transition écologiques sont moins nombreux, mais plus qualitatifs. Une passerelle cyclable et desservant les voies sans boulodrome géant au Raquet, c’est possible et plus utile à budget constant.
Mais faire la transition écologique c’est aussi d’autres projets, autrement plus essentiels :
un réseau cyclable dense et sécurisé, pas uniquement orienté vers le tourisme, mais aussi pour la vie quotidienne. À ce titre, rendre chaque pont de l’agglomération adéquat pour la pratique du vélo représente un budget conséquent (1M€ selon Claude Hégo rien que pour le pont de Cambrai),
le développement de l’agriculture biologique et la création de filières de transformation/distribution : la conserverie communautaire ou encore le développement de la consigne,
le développement de filières économiques écoresponsables : coopératives, industrie verte, artisanat…
les économies d’énergie via une rénovation massive des bâtiments, la production, voire le stockage d’énergie verte mais aussi des outils de mise en concordance de la consommation et de la production.
Ces projets doivent être défini pour, mais surtout, avec les citoyen·nes afin recréer une dynamique collective de développement du territoire qui ne peut se faire sans l’assentiment de toutes les parties prenantes.
Bref, plus que jamais, le Douaisis a besoin d’écologistes pour une transition écologique effective, mais surtout, une politique cohérente au service des habitant·es.
L’année 2024/2025 sera décisive de ce point vue.
Publié le jeudi 3 octobre 2024 à 10:00:00.