Ce 28 janvier, le conseil municipal de Douai avait lieu, avec lui, le vote du PPI. Dans ce dernier, des avancées, mais aussi, un terrain de football en gazon synthétique auquel les élu·es écologistes étaient opposé·es.
Je partage largement cette réticence à propos des terrains synthétiques. Pour plusieurs raisons :
il est difficile de faire confiance aux fabricants, malgré leur green washing : comme l’a dit Mickaël Dozière (adjoint au sport), “dans les années 2000, on trouvait bien de recycler les pneus pour faire des terrains de football”. Aujourd’hui, l’Union Européenne a proclamé leur interdiction au motif de la diffusion de microplastiques et des impacts sur la santé des sportifs/ves. J’avais d’ailleurs déjà évoqué mes réticences aux terrains synthétiques en 2020 sur ce blog, il aura fallût bien du temps avant que les alertes ne soient entendues. Aujourd’hui, ces mêmes fabricants changent la formule pour d’autres plastiques qui cassent par temps froid et continuent donc de polluer les abords des stades, peut-on réellement leur faire confiance ?
les terrains synthétiques sont de l’artificialisation, là où les sols pourraient absorber les pluies et les transformer en gazon, ils deviennent de nouvelles sources d’eaux usées (polluées, on l’a vu au point précédent). Malgré la neutralité carbone prônée par les fabricants, dès que l’on creuse, on retrouve d’autres polluants, voir même dans certains cas, du pneu recyclé mais “confiné”…
les terrains synthétiques ne sont pas forcément appréciés par les sportifs, notamment les pros, qui sont loin de les apprécier et évoquent des blessures caractéristiques de ces terrains,
certes, les terrains en herbe nécessitent de l’entretien (mais les terrains synthétiques ont aussi besoin d’être entretenus, les fientes, insectes, résidus organiques etc… se biodégradent plus vite sur un terrain en herbe, on le conçoit aisément), mais c’est aussi de l’emploi. La question revient donc aussi à choisir entre coût de fonctionnement générant de l’emploi local ou investissement plus important,
les terrains synthétiques doivent aussi être arrosés. J’ai moi-même constaté que le terrain synthétique de hockey du stade Demeny était arrosé suffisamment régulièrement pour qu’un système d’arrosage automatique y soit installé (voir illustration de l’article).
Au vu de ces éléments, il me semble effectivement important de différer cet investissement et je me réjouis que les élu·es écologistes aient témoigné de leur réticences à ce sujet. La raison invoquée par Jean-Christophe Leclerc, adjoint, est qu’il faudrait plus de terrains en herbe pour le même usage. Certes, mais à Douai, il y avait des alternatives :
le parc Charles Fenain (et le stade Demeny, en partie) étaient utilisés par la FFD (Foot Féminin du Douaisis). Sa dissolution ayant provoqué le départ de joueuses, ces terrains de nouveau disponibles pourraient accueillir des équipes d’autres clubs (si le Parc Charles Fenain est bon pour les femmes, il l’est aussi pour les hommes),
le stade Demeny, lui même, dispose de terrains délaissés pouvant accueillir de nouveaux terrains enherbés, d’ailleurs, le coût d’un terrain en herbe est bien inférieur (de moitié) à celui d’un terrain synthétique, de même que sa durée de vie (au moins double), à la résidence Gayant, et dans bien d’autres quartiers, il est parfaitement envisageable de créer d’autres terrains en herbe afin de rapprocher la pratique libre du sport des lieux de résidence des usagèr·es,
l’arrosage nécessaire pour les terrains en herbe, soulevé comme contre argument, était incongru quand dans le même temps, suite à la grande insistance des écologistes depuis plusieurs années, un investissement dans la récupération des eaux de pluie était enfin mis en œuvre,
enfin, il existe au stade Demény un terrain synthétique avec des microbilles, comme évoqué précédemment. Ce n’est pas ce dernier qui serait rénové, mais un autre posant finalement moins de problème de pollution (bien que plus vétuste).
Bref, vous l’aurez compris, ce n’est pas une vue de l’esprit, ni, comme l’a simplifié la Voix du Nord, uniquement une question de microplastiques (même si ce n’est pas anodin du tout, les microplastiques…).
Sur la forme, malheureusement, Frédéric Chéreau a refusé, contrairement à son engagement initial, le vote différencié, obligeant nos élu·es à employer des moyens détournés pour se faire entendre.
Inscrit au compte rendu à la demande de Stéphanie Stiernon, l’abstention contre la ligne rejetée par les écologistes, n’aura pas fait l’objet d’un vote formel… Comme je l’ai déploré en commentaire de la séance en direct, cette séquence ne mettait pas à l’honneur une véritable pratique démocratique et ressemblait furieusement à certaines séances du conseil communautaire de Douaisis Agglo.
Il est regrettable que le maire ait choisi de couper le sifflet des écologistes alors qu’il lui était parfaitement possible de permettre le vote différencié, d’autant qu’il n’avait pas été pris de court, mais était bien informé.
Les coups de théâtre ayant suivi étaient cousus de fil blanc… malgré tout, le Maire s’est engagé à accéder aux demandes des écologistes : associer (enfin !) les écologistes au choix du terrain (qui malgré tout resterait synthétique, mais il est permis d’espérer un changement de point de vue…) et, surtout, investir massivement dans la réfection des écoles.
Ce qui me permet de faire le lien avec l’autre revendication (autrement plus importante) qui sous-tendait l’intervention des écologistes et qui n’a pas été reprise par la presse à ce jour : la rénovation des écoles.
En effet, le budget de 1,3M€ consacré au stade faisait également grincer des dents de part sa proportion dans le budget (10% du total) et au regard de la ligne d’investissement concernant la rénovation énergétique des bâtiments et, notamment, les écoles ainsi que la désimperméabilisation des leurs cours. Comme l’a souligné Colline Craeye, avec qui, une fois n’est pas coutume, j’étais d’accord, ce budget a effectivement baissé si l’on compare les lignes de manière rigoureuse.
Bref, le maire s’est engagé à augmenter significativement l’investissement de ce côté, j’ose espérer donc, qu’à l’issue de cet épisode, la concertation sera effectivement de mise afin que chaque partie puisse tenir ses engagements scellés lors du contrat de mandat : voter le budget et passer toutes les décisions de ce dernier au filtre de la transition écologique.
J’aurai l’occasion d’y revenir sur ce blog, je souhaite cependant prendre les devants au regard de l’actualité. La démocratie est malade et son poison vient de ses propres règles.
À l’échelle des communes, la majeure partie des décisions structurantes sont prises au niveau de l’agglomération qui est élue de façon indirecte avec les effets délétères que l’on constate à Douaisis Agglo, mais dans bien d’autres territoires en France. Il me semble urgent de rendre cette élection directe via un scrutin de liste.
Au niveau communal, la pratique du pouvoir reste verticale et une gouvernance collective, bien que possible, reste subordonnée au bon vouloir du/de la maire.
Pour des mouvements politiques émergents comme les écologistes, ceci représente une barrière à l’entrée difficile à franchir (mais rassurez-vous, on y travaille).
Ce défaut de représentativité mène à des aberrations et un effet de “culbute” obligatoire. On se retrouve alors avec un grand écart entre des agglomérations n’ayant pas encore passé le cap de la transition écologique et des territoires nouvellement conquis (comme les métropoles de Lyon, Grenoble… les villes de Loos-en-Gohelle, Grande-Synthe…).
Je documente ces évolutions en relayant très souvent les avancées faites par les écologistes dans ces territoires sur ce blog, dans ma lettre d’information ou sur les médias sociaux, il faut dire que cela donne envie. Un souhait, donc, pour terminer ce billet : puisse la bascule se faire dans le bon sens, et au plus vite, pour aborder plus sereinement les changements induits par le réchauffement climatique global et l’effondrement de la biodiversité.
Note rétrospective du 20 mai 2024 :
Suite au conseil municipal de ce vendredi 17 mai, nos élu·es ont pu exprimer leur position sur ce sujet sans le parasitage des modalités de vote arbitrairement définies par Frédéric Chéreau au conseil précédent.
En effet, la passation de marché du terrain synthétique y a fait l’objet d’un vote comme l’exige la loi. Stéphanie Stiernon, Katia Bittner et Guy Caruyer ont donc pu s’abstenir conformément aux réserves émises par le groupe.
Malgré les efforts pour limiter l’impact de ce terrain, l’herbe est toujours en polypropylène ce qui reste une matière plastique non biodégradable, émettrice de microplastiques et, bien entendu, la surface est toujours, par définition, artificialisée.
La majorité des voix (PS, PC mais aussi LReM/UDI/LR/RN et les autres groupes d’opposition) s’est cependant exprimée en faveur de ce terrain ce qui démontre qu’il reste encore du chemin pour jeter le plastique hors de nos vies et agir plus efficacement contre les effets du réchauffement climatique.
Publié le samedi 27 janvier 2024 à 13:00:00.