Le 27 juin 2022, le Département du Nord a attribué une concession de service public à la société ClearChanel pour la mise à disposition de mobiliers urbains publicitaires.
En plus de la communication institutionnelle, 50% des 500 panneaux publicitaires et 50 panneaux digitaux nouvellement installés afficheront de la publicité commerciale.
Au delà du fait que la communication institutionnelle que l’on trouvera sur ces panneaux sera essentiellement de la propagande au service du bilan du département (changer simplement la vie des gens étant trop demander…), ces panneaux nuisent à notre environnement :
ils défigurent le paysage,
posent des questions d’accessibilité sur les trottoirs,
représentent un danger pour la visibilité des piétons,
demandent de faire des tournées régulières pour leur entretien,
consomment de l’énergie pour leur version numérique ou éclairée…
Bref, ce n’est clairement pas l’idée du siècle ! Nos élu⋅es écologistes du Nord ont, bien entendu, voté contre cette disposition et iels furent bien seul⋅es dans cette démarche…
Alors que ces derniers commencent à fleurir dans le Douaisis (notamment ici à Somain), je pense qu’il est temps de parler de la publicité.
Avant de déployer des panneaux publicitaires supplémentaires, il faudrait peut-être demander aux gens ce qu’ils pensent de cette publicité.
Pour ce faire, il existe un moyen très simple de se rendre compte que la majeure partie des habitant⋅es ne veulent plus de la pub : faire le tour des boîtes à lettres.
La plupart arborent fièrement leur autocollant stop pub. J’ai d’ailleurs pu le constater via mes activités politique de tractage.
Et pourtant, c’est une démarche individuelle. Par défaut, on la reçoit ! Il décider d’en mettre un, trouver l’autocollant et le coller. D’ailleurs, certains ne manquent pas de style ou d’originalité.
Y a-t-il une démarche écologique plus populaire et partagée que le stop pub ? La question se pose. Peut-être les bloqueurs de pub dans les navigateurs web qui rencontrent également un franc succès auprès des initié⋅es.
Je pense que l’objectif de ces stops pub n’est pas uniquement de préserver l’environnement, mais aussi que, consciemment ou non, nous nous rendons bien compte que la publicité est un fléau. Il s’agit en premier lieu de nous protéger de la publicité.
Car c’est probablement l’impact indirect de la publicité qui est le plus grave : surconsommation, création du "besoin", frustration, formatage… Dans son Manifeste contre le système publicitaire, l’association Résistance à l’Agression Publicitaire fait une énumération exhaustive des dégâts causés par la publicité.
Ces dégâts sont nombreux et documentés très largement.
Malgré cela, les collectivités restent complices, dans leur grande majorité, de ce matraquage.
Bien-sûr, les panneaux publicitaires ne sont pas l’apanage du département. Des communes comme Douai avec JCDecaux, Somain avec ClearChanel également, ajoutent leur contribution à la pollution visuelle. Les EPCI comme le SYMEVAD et ses camions floqués (et éclairés !) ou encore le SMTD et ses arrêts de bus ou publicités lumineuses ou statiques dans les bus sont également de la partie.
Mais c’est aussi exposer les citoyen⋅nes à la publicité que de les enjoindre à se rendre sur Facebook ou Twitter pour aimer la page de leur collectivité…
Comme souvent, les écologistes ont un train d’avance sur le sujet de la publicité. La Ville de Grenoble a supprimé les panneaux publicitaires municipaux en 2014. La Métropole de Lyon a récemment décidé d’interdire les panneaux numériques et prévoit l’interdiction des publicités aux abords des écoles.
Dans une récente publication Bruno Bernard relatait que cette décision avait été motivé par le fait que “Une très grande part du développement des comportements se forge dès la petite enfance : Entre 1200 à 2200 messages publicitaires sont adressés chaque jour à chaque individu.” et qu’“en 2018, les publicités de produits Nutri-Score D et E représentent 53,3 % des publicités alimentaires vues par les enfants”…
Pour toutes ces raisons, je souhaite que la ville de Douai emboîte le pas et refuse l’installation des panneaux publicitaires du département. Ça tombe bien, dans cet article de la Voix du Nord, Christian Poiret dit avoir “choisi de faire les choses en concertation avec les maires. Nous leurs avons envoyé deux courriers. Nous avons d’ailleurs eu des refus. En aucun cas on ne force la main des maires.”.
Je pourrais polémiquer sur cette lubie de sans cesse ne parler que des maires alors que ce sont les conseils municipaux qui décident pour leur commune, mais passons, cela fera l’objet d’un article futur.
Ce que je souhaite, surtout, est que notre ville soit exemplaire aussi et mette un terme à son contrat avec l’entreprise JCDecaux pour ses propres panneaux.
Je viens d’envoyer un courriel au service démocratie participative afin de connaître le terme de ce contrat et potentiellement d’y avoir accès dans sa globalité ce qui me permettra de compléter cet article.
Enfin, comme l’illustration jointe le démontre, les publicités sont bien souvent utilisées par des acteurs des zones de périphérie. C’est ainsi que l’on se retrouve, en centre ville de Douai, menacé par la mort lente et généralisée des centres des villes moyennes, avec des publicités suggérant aux habitant⋅es de prendre leur voiture pour aller dans le dernier fast-food à la mode.
Les plans action cœur de ville et petite ville de demain, pour être efficaces, doivent à mon sens nécessairement s’accompagner de mesures de suppression de la publicité du paysage urbain.
C’est donc aussi une notion d’efficacité (et de crédibilité) de l’action publique qui est en jeu. Comparativement, avec moins de publicité, c’est plus de visibilité pour les enseignes des centres villes. À méditer pour la prochaine révision du Règlement Local de Publicité !
Suite au meurtre de Nahel à bout portant par un policier, de nombreux quartiers populaires se sont embrasés. Douai n’a pas échappé à la règle et a subit de nombreuses dégradations et l’interpellation de 33 personnes.
Un détail frappant est que la publicité a été l’une des cibles principales de ces émeutes (avec les commerces). Un constat lourd de sens qui n’est pas sans évoquer la frustration que la publicité provoque chez les nombreuses personnes qui ne peuvent pas s’offrir ces produits que la publicité fait passer pour indispensables au bonheur…
Un café citoyen au sujet de la publicité a été organisé par la MJC de Lambres-lez-Douai. J’y ai participé et je vous propose de le découvrir car il couvre de nombreux aspects de cette dernière.
L’année 2025 a commencé avec une première imposture que je vais vous décortiquer.
L’entreprise JC Decaux a cru bon d’utiliser les panneaux qu’elle a en gestion pour nous délivrer un message. Et ce dernier est politique.
Sur ce panneau, on peut lire que : « la communication des marques (novlangue pour ne pas dire la pub) finance ce mobilier d’information (novlangue pour ne pas dire panneau de pub) ».
Or, factuellement, si l’on considère que les 50% de communication institutionnelle (en ce moment les vœux, de nouveau) ne sont pas de la pub mais de l’information, alors ce n’est qu’un demi mobilier d’information.
Le demi "mobilier" supplémentaire, c’est bien de la publicité.
Alors, ce panneau annonce-t-il le renouvèlement du marché sous peu ? Si oui, une consultation du public sous forme de RIC serait de bon ton. Ne serait-ce que pour permettre une prise de conscience des enjeux tant la pub nous prépare, comme ici avec ce cas d’école, à la pub.
Grâce aux élu·es écologistes de la ville, j’ai pu obtenir les détails du contrat conclut entre JCDecaux et la ville de Douai le 21 décembre 2012 (suite à une délibération en date du 19 octobre 2012) de la main de Jacques Vernier alors maire.
Un contrat conclut pour une durée de 15 ans (ce qui me semble énorme, surtout pour un choix effectué en fin de son dernier mandat, entravant ainsi la liberté d’action de ses successeur·euses sur le sujet durant deux mandats pleins).
Le prestataire jouit ainsi de 70 MUPIs (mobiliers urbains publicitaires et d’informations) dont une face est consacrée à la publicité tandis que l’autre est consacrée à l’information à discrétion de la commune.
Le prestataire gère l’entretien et la maintenance de ces derniers et s’acquitte d’une redevance de 287€ par panneau et par an soit un revenu annuel pour la ville de 20 090€ (au moment de la signature du contrat).
Tous les panneaux sont rétroéclairés (probablement pas en LED, bien que je ne suis pas sûr que tous fonctionnent encore) et l’électricité est à la charge de la commune (connectés au réseau d’éclairage public de la ville de Douai).
Les panneaux sont sensés s’éteindre dès minuit et ne se rallumer que sur le coup de 6h du matin. À l’heure où l’éclairage public est coupé dans la commune, on peut trouver regrettable que ces panneaux soient toujours allumés, même si, leur consommation, au regard de celle de la ville, est certainement anecdotique.
Pour conclure, la fin de ce marché intervenant en 2028, il me semble important que ce sujet soit intégré au débat des municipales de 2026 à Douai.
Publié le mercredi 26 avril 2023 à 09:15:00.