À l’occasion des élections municipales partielles qui auront lieu ce dimanche 9 juillet à Brunémont, je me suis rendu dans ce charmant village pour distribuer notre nouveau tract au sujet de l’agglomération du Douaisis.
Ce n’est pas un secret, Brunémont est une terre de mission pour les écologistes. Avec un vote à 70% pour le Rassemblement National lors des dernières législatives, on peut dire que les écologistes ont du travail pour y faire évoluer les mentalités (je citais déjà ce village dans un billet précédent sur l’extrême droite). Longtemps socialiste, la commune a lentement mais sûrement dérivé au rythme de sa mutation en village dortoir.
Selon Alain Dupont, actuel maire de la commune, la commune doit faire face à des difficultés financières héritées des dépenses réalisées dans les précédents mandats. La crise énergétique et l’inflation s’ajoutent à ces difficultés.
Brunémont est une petite commune qui a longtemps eu de grands projets, trop grands certainement. On y retrouve l’empreinte de notre agglomération, d’une certaine façon.
Ceci dit, je pense que dans ce type de commune, l’enjeu n’est pas là. Il s’agit surtout de convivialité et de vivre ensemble. Comment sortir de la trappe "ville dortoir" et retrouver un minimum de lien social, notamment avec les très nombreux lotissement construits ces dernières décennies (sur des terres cultivables bien entendu).
D’une certaine façon, Brunémont y a perdu une partie de son âme. La césure entre village originel et résidences est très perceptible et matérialisée par la route départementale qui coupe littéralement le village en deux.
Dans un article de l’Observateur du Douaisis, on en apprend un peu plus sur Clément Locquet, inconnu au bataillon politique, qui souhaite aujourd’hui porter une opposition à Brunémont.
Actuellement étudiant en Sciences Politiques, étrangement, ce dernier se dit "apolitique". À peine dôté d’une conscience politique, au lieu de la partager avec ses concitoyen·nes, ce dernier, leur propose plutôt de l’exclure du débat… Un sens du partage étonnant qui illustre parfaitement l’adage : “Si vous ne vous occupez pas de politique, la politique s’occupera de vous”.
Un apolitisme affiché, mais un sponsoring avéré par le parti Les Républicains. Les indices ne manquent pas : une proximité affichée avec Frédéric Nihous (passé successivement par le RPR, puis CPNT et enfin, LR…), une valorisation des actions "Hauts-de-France Propres" tutorées par la région Hauts-de-France et sa majorité de droite avec Xavier Bertrand…
Bref, il semble que les habitant·es de Brunémont soient pris pour des lapins de 6 semaines. Quand c’est flou…
Ce qui me permet d’élargir mon propos à l’appartenance politique de façon générale. Le ballet incessant des Sans-Étiquette démontre une chose ; au niveau local, afficher ses idées sur le monde est perçu comme handicapant.
Vous le savez, je suis militant écologiste, mais aussi adhérent à EÉLV. La raison pour laquelle j’ai adhéré à ce parti est que je me retrouve dans la majorité des idées et des positions qu’il porte.
Être adhérent à un parti ne signifie pas cautionner tout ce qu’il dit, ni être d’accord à 100%. EÉLV est juste le parti avec lequel je suis le plus d’accord. J’aurai l’occasion d’y revenir ici, mais il me semble qu’une personnalité politique, même locale, a le devoir d’élargir sa pensée (et son impact) au niveau national. Ne serait-ce que pour s’intégrer aux politiques publiques menées à d’autres échelons, mais surtout, pour participer à quelquechose de plus grand, à des victoires plus globales.
De nombreuses personnes viennent régulièrement me demander ce que je pense de telle sortie de Sandrine Rousseau, telle prise de parole de Marine Tondelier… c’est à chaque fois une occasion de débattre, d’exposer les opinions de chacun·e. Je ne le vis pas comme un handicap, mais une richesse.
Nos élu·es bénéficient également d’une structure (qu’iels financent en partie). Un parti est avant tout une sorte de "think tank" et de réceptacle des retours d’expérience des autres élu·es.
En cette période d’élections sénatoriales, il apparaît encore plus clairement que nos élu·es sont aussi un support important pour conquérir de nouveaux sièges en national grâce à des grand·es électeurices. Quand nous avons bon espoir de faire élire Céline Scavenecc sénatrice quand la France Insoumise, qui souffre d’une représentation locale inexistante (voire sabordée délibéremment à Douai), ne peut pas espérer avoir un seul siège.
À l’heure où le Rassemblement National récolte un nombre important de voies, l’apolitisme fût aussi une manière de s’extraire du barrage républicain porté sans équivoque par les partis de gauche, et, timidement, mais encore un peu, par certain partis de la droite et du centre.
Je pense que c’est un statut quo qui a profité et continue de profiter au développement de l’extrême droite. Par crainte de ne pas être réélu·es, certain·es élu·es ont choisi de ne pas entrer dans le débat idéologique auquel nous obligent les extrêmes.
Sans figures locales engagées sur des thèmes globaux pour désamorcer les simplismes, pour porter les valeurs républicaines, contrer les idées racistes et xénophobes, et stopper le repli identitaire, l’extrême droite a eu le champs libre, avec le résultat que l’on connaît : des députés Rassemblement National dans les deux circonscriptions du Douaisis.
Finalement, les petites communes ont été livrées sans grande résistance aux fascismes pour conserver telle ou telle indemnité, tel ou tel poste de prestige. Aucune leçon n’est tirée de tout cela à Brunémont puisqu’il s’agit, une fois encore, d’ambitions et de rancœurs locales plus que de visions véritablement opposées. Nous saurons dimanche si, aux yeux des brunémontois·es, il faut couper plus souvent l’herbe du camping, ou non…
Note rétrospective :
Alain Dupont l’a emporté haut la main, selon l’Observateur du Douaisis avec 150 voix contre 93 pour Clément Locquet.
J’avais profité de cette séquence pour me rendre à Brunémont afin de tracter notre bilan Douaisis Agglo à un moment politique important (comme pour Lambres-lez-Douai) et j’ai été frappé de constater que l’affiche du maire n’avait pas encore été collée. Je l’ai croisé lors d’une visite organisée par "SOS Nature du Douaisis" : il était serein et m’a dit qu’il n’avait pas encore distribué son tract dans les boîtes aux lettres…
Ainsi, la victoire, dans des petits villages comme Brunémont, est surtout une question de notoriété, voire d’amitié. Les sciences politiques sont probablement moins utiles que le contact humain. À méditer !
Publié le jeudi 6 juillet 2023 à 12:15:00.