L’écologie dans le Douaisis, avec et pour vous !Nicolas Froidure

Aménagement du parvis du grand couple heureux

À l’angle de la rue du Kiosque et de la rue de Paris, se situe le parvis du grand couple heureux. Cet endroit a une résonance particulière pour moi, j’y passe très souvent, et je nous identifie un peu, ma compagne et moi, à cette magnifique œuvre de Roseline Granet, quand je pense à la chance que nous avons eue jusqu’ici.

Je l’aimais aussi beaucoup, dans sa forme précédente, car c’était un large espace avec de nombreux bancs où le passage à vélo était très aisé et où l’on s’arrêtait fréquemment pour un brin de causette entre cyclistes.

🔗Genèse de l’idée et premier couac

Photographie du parvis pendant son réaménagement

C’est en conseil de quartier que nous avions évoqué le mauvais état des dalles qui étaient brinquebalantes et risquaient de faire trébucher les nombreuses personnes qui y cheminaient. Cette simple demande de remplacement/repositionnement de dalles s’est muée en projet de réaménagement total par un processus décisionnel qui m’est inconnu à ce jour.

Après une réunion à laquelle je n’ai pu assister que partiellement, il a été décidé de faire "place nette" le temps de consulter les usager·es. Les bancs, le panneau d’affichage libre et les murets existants ont donc été détruits.

Au delà du terme "place nette" et de sa connotation, j’ai alors trouvé dommage de repartir d’une feuille blanche alors qu’il était possible que la consultation mène à la conservation de certains éléments (et donc permette des coûts de réaménagement moindres, plutôt que de dépenser immédiatement 53 688€).

De plus, pendant ce temps, les usager·es seraient privé·es de bancs (et de l’ombre portée sur eux par les grands arbres présents sur place). Ces bancs en fonte sont très confortables et j’y suis extrêmement attachés, bien qu’ils aient tendance à disparaitre au profit de banc anti-clochards, ce qui m’offre une transition opportune…

🔗Des desseins peu glorieux

Car, en réalité, l’objet de ce nettoyage par le vide était de répondre au mécontentement de certain·es riverain·es qui n’appréciaient pas la présence de personnes marginalisées, parfois alcoolisées, sur cette place, depuis des temps immémoriaux.

En effet, il y avait régulièrement des attroupements et parfois quelques disputes à cet endroit. Je n’ai cependant pas eu vent d’agression de passant·es. Les bancs étant sur les côtés, lorsqu’ils étaient occupés, les passant·es se trouvaient à bonne distance car il y avait précisément de la place pour toutes et tous.

Ces personnes n’ont, évidemment, pas pour autant disparues, elles se réunissent un peu plus loin, assises sur le muret restant, dans les arrêts de bus a proximité ou sur les marches le long du magasin Match. Elles sont peut-être moins visibles, cela dépend pour qui.

Je ne vais pas me faire que des ami·es, mais je trouve cela indigne. Je regrette que l’on chasse la misère plutôt que de tenter d’y répondre intelligemment. Certes, ces personnes pouvaient parfois causer de légers troubles, mais au moins, en cas de problèmes, elle étaient visibles et il y a eu régulièrement des interventions de passants pour aider une de ces personnes dans une situation difficile (coma éthylique, hypothermie…), cachées, seront-elles encore secourues ? Je pense notamment à la personne sans domicile qui dormait sur le banc derrière le panneau d’information et que j’ai réveillé une fois pendant un collage matinal, a-t-elle trouvé un nouvel endroit à l’abri des éléments ?

🔗Un aménagement temporaire sans consultation

Mais ma surprise ne s’est pas arrêtée ici puisqu’ensuite, la place a été en grande partie clôturée ne laissant la possibilité aux passant·es que de la traverser dans ses deux diagonales. Visiblement le fait que les personæ non gratæ continuent de s’assoir sur les murets contrariait les objectifs fixés.

Un détail m’a également surpris, sur le panneau du projet, il était indiqué que le projet était "mené en concertation avec le conseil de quartier Barlet / Centre / Faubourg de Cambrai". Membre de ce dernier, je réfute cette assertion.

Si nous avions pu donner notre avis sur cet aménagement, nous aurions évité un grand nombre de conflits d’usages nouveaux qu’il a créé :

  • les couloirs étroits rendent difficile la traversée de la place sur son vélo (encore moins en vélo cargo ou tricycle), difficile, aussi, de se croiser en poussette (encore moins avec une poussette double) et ne parlons pas des fauteuils roulants,

  • la condamnation des marches a provoqué la chute d’une personne qui a tenté d’enjamber le muret,

  • les personnes qui ne se résignent pas à traverser la place au pas ou avec vélo ou trottinette à la main représentent un danger pour les piéton·nes,

  • il n’est plus possible pour les personnes agé·es d’y faire une pause salutaire avant d’arriver à leur domicile, sac de courses en main.

Le constat est déplorable, en chassant la misère (ce qui est bien triste en soi), on a fait d’autres dégâts humains collatéraux.

Le chantier a causé d’autres problèmes, deux arbres ont été déracinés et mis en pot : l’un est mort, l’autre semble mal en point. Les plantes disposées sur le parvis semblent en pleine terre mais sont en réalité en pot, tant et si bien qu’un arrosage régulier est nécessaire.

Je suis parvenu, lors de la visite de la place avec le Maire et le conseil de quartier à faire rétablir une des deux sorties qui avait été condamnée pour une raison inconnue et qui créait des situations dangereuses pour les personnes qui devaient du coup enjamber le muret pour éviter un détour.

Je ne suis pas hostile à toute modification de cet endroit mais j’aurai aimé que nous soyons consulté·es en amont de toute modification.

🔗Une consultation biaisée

J’ai donné aujourd’hui mon avis sur cet aménagement car, il faut acter que l’on ne part pas d’une feuille blanche. Le formulaire est très orienté puisqu’il propose de se positionner par rapport à cet aménagement temporaire et de dire ce qu’il faudrait y "ajouter, améliorer ou retirer". De plus, les champs sont limités et impossible d’ajouter une image comme je l’ai fait sur ce blog.

Alors, forcément, mon avis implique de défaire certaines choses que cet aménagement temporaire frayeux a mis en œuvre.

Tout d’abord, je pense que plus de végétation est bien-sûr bienvenue. Mais cela peut se faire en bordure sans entraver la circulation, en laissant de grands espaces sur la place, des bancs en fonte plus nombreux à des endroits stratégiques pour maximiser l’ombre et la fraîcheur.

Pour permettre aux cyclistes et piétons de circuler sans soucis, prévoir une piste cyclable bien signalée et marquer la pente douce comme une zone partagée en demandant aux cyclistes de rouler au pas (ou pourquoi pas, élargir celle-ci pour y différencier les cheminements aussi). Un marquage pour une piste le long des préaux pour aller jusque match serait aussi de bon ton. Aussi, casser la bordure qui mène au rond point et qui oblige aujourd’hui les vélos à faire un crochet dangereux en contre sens.

Tout cela mis bout à bout donnerait quelque chose comme ce que j’ai esquissé ci-dessous. Ce n’est pas un plan à l’échelle mais simplement une idée qui laisse plus d’espace piéton, crée une voie directe dédiée pour les cycles et redonne accès à un cadre de vie agréable, ombragé et reposant pour que les personnes qui la traversent puissent y rester, autant qu’iels le veulent.

Exemple de projet pour le grand couple heureux

Alors, concluons par un peu de poésie, laissons flâner les grands couples heureux, il ne s’en porterons que mieux !


🔗Petit aparté

Lors de la visite du parvis, le maire m’a opposé le fait qu’il était possible de passer par les entrées / sorties du parking pour les voitures.

Ce n’est pas une situation idéale pour plusieurs raisons, mais d’abord, la place permet des aménagements cyclables sûrs, dès lors, pourquoi s’en priver, pourquoi chercher à la soustraire aux cyclistes ?

Et puis, l’entrée a une bordure assez abrupte et lorsqu’on vient de la rue de Paris, on doit tourner à gauche et couper le trafic venu d’en face. Cela pose donc problème car on ne peut aller vite (à cause de la bordure) et en même temps, y aller lentement fait perdurer la situation de danger venu d’en face. A fortiori, avec des enfants, la situation est d’autant plus dangereuse que, l’entrée étant en pente, ils ont tendance à arriver vite sur le parking créant une situation dangereuse de part et d’autre.

Pour la sortie, la pente pose de nouveau problème car elle implique un démarrage en côte, potentiellement chargé de ses courses, potentiellement avec des automobilistes fâchés de part et d’autre.

Publié le mercredi 13 août 2025 à 21:00:00.